L’avenir des ascenseurs du canal du Centre historique

Dans le Soir du 28 février 2015

Plus de bas que de hauts pour les ascenseurs hydrauliques

MATHIEU COLINET

LA LOUVIERE
Le site classé Unesco attend des investissements régionaux
La Wallonie n’a pas encore trouvé les 14 millions d’euros nécessaires. Ces atermoiements inquiètent certains. Ils ressortent pour le coup une vieille menace, celle de voir le site perdre sa reconnaissance Unesco.

Dans un mois, la saison touristique débutera et les responsables de l’ASBL Voies d’Eau du Hainaut, qui exploite les quatre ascenseurs hydrauliques, ne savent pas de quoi elle sera faite. Dans leurs ambitions les plus optimistes, ils espèrent que les quatre ouvrages inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco fonctionneront comme à cette époque pas si éloignée où ils laissaient admirer leur mécanique, chef-d’œuvre de puissance et de précision, à des touristes venus de loin. Mais le scénario le plus probable n’est pas celui-là: comme l’année passée, le site risque de vivre en mode mineur.

En 2014, les touristes n’ont pu utiliser qu’un des quatre ascenseurs lors de la célèbre descente de ce tronçon du canal du Centre. Pour actionner les autres, la Région wallonne aurait dû pouvoir compter sur davantage d’agents spécialisés, capables dans un mélange de science et de douceur, de faire monter et descendre ces ouvrages d’une autre époque. Beaucoup sont partis à la pension ces dernières années sans laisser en héritage sous quelque forme que ce soit leur précieux savoir-faire. «Cela nous pose un vrai problème, affirme Fabienne Capot, députée provinciale hainuyère et présidente de l’ASBL Voies d’Eau du Hainaut. Un important volet formation doit être mis sur pied. Ce dernier doit prévoir des façons de faire pour assurer la transmission des savoirs.»

Sont apparus également certains problèmes techniques ces derniers mois, dont la résolution, selon le diagnostic qui a été posé, passe par des interventions dites de maintenance plus ou moins importantes. Un montant a été cité à l’automne dernier, censé couvrir l’ensemble des dépenses: 14 millions d’euros sur quatre ans.

«L’ennui, c’est qu’aujourd’hui le ministre wallon Maxime Prévot ne semble plus aussi optimiste quant à la possibilité d’investir cette somme sur le site, s’inquiète Olivier Destrebecq, député libéral. Il l’a dit l’autre jour en commission. Du coup, je suis assez pessimiste pour les ascenseurs mais au-delà pour la région du Centre, dont le redéploiement doit pouvoir s’appuyer sur une offre touristique de choix. L’étude du bureau de consultance BDO livrée récemment aux forces vives de la région, même si ce travail ne dépasse guère les constats, fait référence à cette piste. Pour Charleroi ou pour Mons, de l’argent régional, on parvient toujours à en trouver. Mais pour La Louvière, c’est bizarrement plus compliqué.»

Cette menace qui pèse sur l’aide régionale pousse même Olivier Destrebecq à aller plus loin, quitte à être quelque peu excessif: les ascenseurs pourraient selon lui payer le prix fort de ce désinvestissement et finir par perdre leur reconnaissance Unesco. «Oui, il faut l’avouer, il y a très peu de chances que cela arrive, il est très rare qu’un site subisse un tel sort, affirme-t-il. Mais le risque n’est pas nul tout de même. Il doit être pris en considération.»

Le ministre wallon Maxime Prévot affirme en avoir pris la mesure. S’il n’a toujours pas trouvé les 14 millions d’euros précités, ceux-ci restent son objectif dans les mois à venir. Que le canal du Centre ne soit pas un axe fluvial à dimension économique l’obligera selon lui à un travail de conviction un peu plus appuyé. «Il n’est pas question de laisser tomber un site comme celui-là, affirme-t-il. Nous comptons donc bien trouver l’argent nécessaire pour effectuer les réparations qui s’imposent mais aussi le développer de sorte à doper son attractivité touristique. Aujourd’hui, et j’ai été très surpris de l’apprendre, le site n’attire pas davantage de touristes qu’avant son inscription sur la liste du patrimoine mondial fin des années 90. Ce n’est pas normal, il faut absolument revoir la façon de travailler et augmenter les retombées socio-économiques liées au site. L’ASBL qui le gère a manifestement échoué à ce niveau-là. Il faut corriger le tir.»

MATHIEU COLINET

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