Visite du Louvre-Lens : superbe !

Après le MAS, ce 25janvier 2014, les architectes du Centre ont visité le Louvre-Lens, musée qui vient de recevoir le prix de L’Equerre d’argent.

Photos de Robert Bassetto

 » Le musée du Louvre à Lens, réalisé par les architectes Kazuyo Sejima et Ryue Nishizawa (Sanaa) pour le compte de la région Nord-Pas-de-Calais, a été distingué le 18 novembre par le Prix d’architecture de l’Equerre d’argent 2013.

Pour accueillir les collections, l’agence japonaise a conçu des bâtiments évanescents sous le ciel laiteux du bassin minier.

 Kazuyo Sejima et Ryue Nishizawa, les associés de la célèbre agence japonaise Sanaa, ont bien compris l’humilité des mineurs de fond. Le bassin minier a servi la France en charbon. Le Louvre-Lens, inauguré le 4 décembre 2012, a été construit dans ce même esprit, tant il joue la carte de la retenue et de la discrétion dans ce paysage de terrils et de corons. A l’emplacement de l’ancienne fosse n° 9 des mines de Lens , sur une parcelle de 20 ha recolonisée par la nature, les architectes ont posé cinq bâtiments (28 000 m2 au total) articulés par les angles. Par un jeu subtil de transparence et de réflexion, leur enveloppe se confond avec le ciel laiteux du Nord. « Nous voulions dresser une scène où s’organise la rencontre entre les visiteurs et les œuvres, le bâtiment seul n’est rien », justifient les architectes. Un exercice de modestie pour le plus grand musée du monde qui a séduit son directeur, Henri Loyrette, en 2005 lors du concours : « J’ai vu dans la proposition de Sanaa une idée de variation du palais parisien avec ce pavillon central qui se déploie. » Au cœur de la composition, le hall d’accueil, un carré de verre de 3 600 m² accessible par ses trois côtés. Il distribue de part et d’autre les deux galeries d’exposition, l’une semi-permanente de 3 000 m², la Galerie du temps, l’autre temporaire de 1 800 m². Ces boîtes de béton s’étirent sur le terrain, en suivant la topographie du site. Revêtues d’aluminium anodisé, elles semblent évanescentes. Effet renforcé par la légère courbure des façades. A l’extrémité est, un pavillon de verre (1 000 m²) accueille les œuvres contemporaines et offre un point de vue sur le parc et les terrils jumeaux de Loos-en-Gohelle. A l’extrémité ouest, un théâtre de 300 places (la Scène) complète le dispositif. La rencontre est au cœur du musée. Entre une architecture et un paysage, entre de nouveaux publics et des collections prestigieuses. Et aussi, de manière inédite, dans les coulisses, réserves et ateliers de restauration étant rendus visibles. Une rencontre qui reste à construire sur le territoire pour que le Louvre-Lens apporte au bassin minier l’élan économique et le dynamisme qui lui font encore défaut. (Source : Le Moniteur) »

Le mieux est d’illustrer notre visite par les commentaires repris du site www.archicool.com

« Fabuleuse! L’architecture de l’équipe conduite par SANAA*, du Louvre Lens inauguré en décembre 2012, révèle la magie que l’on est en droit d’attendre d’une réalisation contemporaine d’exception en ce début de XXIe siècle ! En rendant les limites floues, entre ciel, sol et parois, elle créée ici un univers très particulier; libre comme dans un songe… semblant se délivrer de toute contingence, c’est une architecture dématérialisée, dé-contingentée. C’est l’aboutissement d’une histoire millénaire qui trouve sa source depuis que l’on s’enferme dans des murs.
DSC_3198Effacer les limites ! cela a commencé à l’époque médiévale avec ces plafonds en trompe l’oeil, ces ciels peints, puis par le moulurage savant et doré de tout ce qui fait angle, créant ainsi une illusion de continuité, une disparition de l’enfermement, du pli et de la rupture.

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Aujourd’hui, débarrassée de ses scories décoratives, l’architecture contemporaine n’a de cesse de faire disparaître la masse et la matière synonymes d’obstacles et d’empêchement. Seul doit subsister l’essentiel; la dimension onirique du monde… où comment habiter un nuage ! Mais pour cela, le résultat ainsi construit ne doit être ni maigre, ni faible, ni laborieux ni contraignant.

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SANAA fille du dieu Bauhaus?
Historiquement, SANAA ne fait que poursuivre ici les rêves de Mies van der Rohe, et du Bauhaus qui voulaient faire entrer l’art dans l’usine, désacraliser l’architecture de sa tour d’ivoire et de ses scories ornementales. Oui l’édifice conçu par SANAA est un lointain descendant du monde industriel, de la typologie industrielle, oui il recherche son exigence dans un minimalisme qui enlève tout superflu, et toute intimidation culturelle, toute anecdote superfétatoire qui distrairait le visiteur plus qu’il ne l’enseignerait. 

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Ici l’expérience unique, c’est la disparition des limites et de l’accessoire, c’est l’expérience de la générosité et de la liberté spatiale, c’est cela le respect que nous gratifie le Louvre Lens.

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Visite

A peine sorti de la gare de Lens, une bâche précipitamment tendue sur une façade aveugle vous indique le chemin, mi improvisé, mi dépêché de toute urgence, conçu pour vous conduire à l’ancien puits N°9 (Théodore Barrois), devenu le nouvel axe culturel de Lens. Ce cheminement serpente entre les souvenirs d’un Lens industrieux, fait de briques et de hasards. Hasards d’une ville construite autour de ses cités minières édifiées concentriquement autour de chaque puits de mine, au fur et à mesure de la mise en exploitation de son riche et dangereux sous-sol.

 

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Aplati ! le musée souligne l’horizon plus qu’il ne vole la vedette aux terrils émergeant à l’horizon, comme si le poids massif d’un passé inoubliable obligeait à la retenue élégante du présent.

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Le musée.

Autour d’un noyau central, ou tout l’art de SANAA est à l’oeuvre, fait de transparences, servant de hall d’accueil et regroupant tous les services d’un lieu public contemporain, se distribuent à la façon des pales d’une hélice, deux ailes diamétralement opposées à la volumétrie imperceptiblement infléchie ; La galerie des expositions temporaires, et la galerie du temps, œuvres de SANAA et de ses associés.

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La galerie du temps, d’accès libre pour l’instant, est sans doute, ici, l’espace d’exposition le plus bluffant dans sa capacité, si chère à ces architectes, à brouiller les limites physiques, à effacer le visible afin de rendre perceptible l’invisible. On y progresse comme dans un nuage, comme dans un univers semblant continu, généreux, ample et sans limites. Si l’art est sensé ouvrir des portes sur l’infini, pourquoi le musée devrait il contraindre ce même infini? Semble nous interpeler SANAA.

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Voyage sur le Styx
Dans un texte d’intentions, Sejima Kazuyo explique, pour ce projet du Louvre Lens, avoir voulu représenter des “barques sur un fleuve qui seraient venues s’accrocher délicatement entre elles.“ A la lumière de cette explication, le Louvre Lens, comme son géniteur le Louvre Paris, lui aussi pouvant être assimilé à de vastes barques alignées le long de la Seine, est un transfert pour un dernier voyage, un voyage sur le Styx. Oeuvre orphelines, mais surtout mortes, le musée occidental est leur dernier voyage, le jour ou elles en sortiront, elles ne seront probablement plus que poussières. Ici la traversée du Styx, c’est cet espace temps entre une lointaine histoire passée, et ces objets suspendus dans leur vol, ne nous offrant plus aujourd’hui que le mystère de leur si parfait esthétisme, mais à jamais muets de toute vérité première.

DSC_3253DSC_3267DSC_3272 DSC_3274 DSC_3275Louvre Lens ; autre chose qu’un dépôt d’oeuvres ?
Si l’architecture signée de SANAA au Louvre Lens est incontestablement ce qui s’est fait de mieux en édifices culturels (fortunés) en France, depuis la pyramide du Louvre (1989), la faiblesse du Louvre Lens tient davantage dans son apparente absence de légitimité quant à l’autorité culturelle et scientifique de son actuelle programmation. Le Louvre Lens n’est pas encore un musée à part entière, doté d’un véritable programme scientifique, mais bien un dépôt d’oeuvres du Louvre Paris. Un dépôt artificiel, comme le sont ses vraies-fausses réserves, visibles au sous-sol. Quelque part c’est sa faiblesse à laquelle il faudra remédier rapidement si ses commanditaires souhaitent qu’après une visite de curiosité, les visiteurs reviennent….. Le coup des Etrusques à toutes les sauces (objet de l’actuelle exposition temporaire,) risque de vite lasser une clientèle habituée à prendre un jet pour aller voir au bout du monde une exposition unique, un moment unique, une émotion unique …. Pour l’instant rien de tel, mais un ressenti condescendant de quelque chose concédée jugée bien suffisante… Ce n’est pas à la hauteur de l’écrin.

En attendant il faut, toutes affaires cessantes, partir à l’assaut du site de l’ancienne fosse N°9 de Lens, scorie fossile de tant de passé, magnifié sublimement par cette renaissance, c’est à la fois l’accomplissement ultime des idées architecturales du Bauhaus, du XXe siècle, un accomplissement millénaire de la dématérialisation du monde, du passage de l’obscurité à la lumière, de l’accessoire à l’essentiel, du visible à l’invisible. Le chemin architectural parcouru ici, semble cependant antinomique de l’apparent manque d’ambition, ou de bonne volonté, du projet scientifique réel du musée du Louvre. Le contenu réel du Louvre-Lens reste à inventer ! Tout comme son accrochage urbain d’ailleurs !

ON NE SAURAIT MIEUX DIRE ( ECRIRE!)

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