Le parlement s’attaque au code Di Antonio deux ans après le vote du code Henry. Un débat kilométrique mais déterminant pour l’avenir de la Wallonie.
Le 24 avril 2014, le parlement wallon approuvait à la hussarde le Code wallon du développement territorial (CoDT). Le texte avait été défendu par l’Ecolo Philippe Henry, ministre de l’Aménagement du territoire au sein d’une coalition qui outre les Verts, souvenez-vous, rassemblait aussi le PS et le CDH. La Wallonie se dotait enfin d’une législation moderne en la matière, pensait-on alors.
Erreur ! A l’été 2014, PS et CDH s’accordaient sur une déclaration de politique régionale. Et les choses n’ont pas traîné : début d’une réflexion sur « une réforme de la réforme » dès janvier, report sine die de la mise en œuvre des nouvelles règles en mai, consultations autour de Carlo Di Antonio tout au long de l’année (30 acteurs rencontrés régulièrement, 23 semaines de brainstorming, 90 réunions). Le tout pour accoucher d’un « nouveau CoDT » dont les députés wallons débattront dès ce lundi 11 janvier.
Le nouveau marathon parlementaire ne devrait pas s’achever avant l’été prochain. Trois réunions hebdomadaires sont prévues (lundi, jeudi et vendredi), en tout cas les semaines où siège l’assemblée wallonne. Avant les vacances de Noël, les élus ont offert un avant-goût de ce que devraient être les débats en se chamaillant sur la procédure ou l’audition d’experts dont la plupart ont été consultés par le ministre et/ou avaient déjà été entendus en 2014 lors de l’examen de la première version du texte. Cela promet.
L’opposition MR va se montrer très critique. Ecolo aussi avec Philippe Henry, désormais député, en première ligne. Même si tout n’y est pas à jeter, reconnaît son successeur au gouvernement, le CoDT défendu par l’Ecolo il y a un an et demi est très sérieusement amendé. « Je serai en tout cas intransigeant sur la simplification des procédures et des pratiques » , a déjà prévenu l’ancien ministre. Dans la majorité, PS et CDH devront aussi accorder leur violon, notamment sur les questions liées à la ruralité et sur les rapports entre ville et campagne.
Ce code concerne l’ensemble des Wallons. On songe aux particuliers ou aux entreprises pour leurs demandes de permis, les communes pour l’aménagement de leur territoire ou l’aménagement des centres urbains, les défenseurs de l’environnement pour la place à accorder aux éoliennes par exemple. Il y est question de permis, d’autorisations, de délais, de recours, depuis les nouveaux espaces résidentiels jusqu’à la création d’une zone d’activités économiques.
« Il s’agit d’aboutir à une vision territoriale à long terme comme l’impose l’Europe , a souligné le ministre Carlo Di Antonio en préfaçant le débat. Le contexte européen insiste surtout sur la nécessité de lutter contre l’étalement urbain. Or nous serons plus de 4 millions de Wallons en 2035, ce qui nous impose de construire 12.000 nouveaux logements par an. Enfin ce texte doit aussi contribuer au redéploiement économique de la Wallonie, simplifier et accélérer les procédures au bénéfice des citoyens, des entreprises et des pouvoirs publics. »
Le CoDT version Philippe Henry entérinait des avancées majeures, qui sont conservées : une meilleure lisibilité des textes, la promotion de documents à valeur indicative plutôt qu’obligatoire pour augmenter la souplesse et la créativité dans les projets, l’instauration de délais de rigueur pour les décisions administratives, un meilleur dialogue entre tous les acteurs…
Le CoDT version Carlo Di Antonio précise l’organisation des délais de rigueur mais revient aussi sur les notions de centres urbains, de périmètres d’enjeu régional ou de sites à réaménager, pour des questions de sécurité juridique. On rediscutera aussi, parmi de très nombreux points, des éoliennes en zone agricole (le ministre préconise de les implanter le long des autoroutes) ou de la possibilité de monter des dossiers qui associent plusieurs communes.
L’objectif ? Une entrée en vigueur en 2016 encore avec l’adoption des indispensables arrêtés d’application. Mais la Wallonie n’en aura pas fini pour autant avec la réflexion sur son territoire. Le Schéma de développement régional (SDER), texte de référence dont le CoDT sera la boîte à outils, devrait être approuvé en 2017 et le guide régional d’urbanisme (les normes dans tous leurs détails) en 2018. On sera alors près des élections. En espérant qu’une nouvelle majorité ne décide pas de tout remettre en cause…